La valeur morale et sociale

des équipages Corsaires et de leurs États-Majors

 

Les équipages, les Capitaines.

 

Un des meilleurs récits d'Auguste Jal, est celui qu'il intitula :

"La vie en poste" vie que menaient, pendant leur séjour à terre, les équipages entiers.

Ledru, le "héros" mis en scène avec tant d'humour, c'est en apparence le matelot seulement, en réalité le matelot et l'officier.

Encore Jal a-t-il -beaucoup trop- laissé dans l'ombre les aspects répugnants. Frustre à tous égards comme un matelot de l'époque, Ledru se trouve du reste miraculeux possesseur d'une somme que seul un officier, plutôt un Capitaine, était susceptible de recevoir (avances et acomptes déduits) après une course exceptionnellement fructueuse.Quant à la manière de vite gâcher l'argent reçu, elle était à peur près identique de la part des matelots et des officiers, Capitaines compris (beaucoup de ceux-ci sortaient du rang.)Jal rend justice à la "probité" et au "brillant courage" de quelques officiers Corsaires du XIX siècle, condamne très rudement la guerre de course et nous renseigne exactement sur un Corsaire malouin, relativement peu connu, dont le caractère et les habitudes ont contribué beaucoup à camper le type de son Ledru. Il s'agit du Capitaine NIQUET, de son vrai nom : Joseph PRADERE-NIQUET.

 

Joseph PRADERE-NIQUET :

Niquet, homme d'une autre espèce que Surcouf, était bien plus que l'idée que l'on se fait du Corsaire; la taille seule manquait...; Il était petit, de chétive apparence, laid. Nul, à voir ce frèle corps, n'y aurait logé une âme ardente. Il était cependant d'une rare intrépidité. et là-dessus, Jal raconte la capture, par NIQUET, avec le simple lougre le "Spéculateur" muni de cinq canons, d'un navire anglais corsaire qui portait dix-huit bouches à feu. Hardiesse forcée d'ailleurs, à moins de se rendre, puisque Niquet s'aperçut trop tard que ce bâtiment n'était pas un paisible bâtiment de commerce. Il l'enleva bravement, et avec habileté, à l'abordage.

Niquet aimait beaucoup la vie joyeuse et dissipée; c'était dans la force du terme ce que les marins appellent un "cheniqueur" buveur de liqueurs fortes de "schnick" d'où schniquer; argot.

Tant qu'il n'avait pas fait de belles prises, il battait la mer, furetait dans toutes les petites criques, faisait en un mot, admirablement bien son métier de Corsaire. Mais était-il à même de satisfaire ses passions, on ne pouvait plus le faire embarquer; il se livrait avec délice à toutes les voluptés d'une orgie perpétuelle et ne songeait à la course que lorsque sa bourse était à peu près à sec.

Boisson et débauche sexuelle, gâchage d'argent stupide autant que malpropre, c'était en effet la coutume invariable de presque tous les membres de tous les équipages corsaires, depuis les novices jusqu'aux capitaines.

 

Joseph PRADERE-NIQUET

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